samedi 5 février 2011

"INCENDIES" de Denis Villeneuve (2011) : Identité


En salles depuis le 12 janvier.

Porté par un excellent bouche à oreille et une sublime affiche, "Incendies" est un des grands films de ce début d'année (même si il a mis presque deux ans à atterrir dans nos salles), à sa manière Denis Villeneuve m'a réconcilier avec un certain cinéma d'auteur qui avait perdu mes faveurs depuis un petit moment : 2001 et le magnifique "Loin" de André Téchiné. Encore une fois les planètes s'alignent et ma nouvelle rencontre avec ce cinéma des racines et de l'exil se fait accompagner de Lubna Azabal (ici magnifique en mère torturée/engagée). Avant toute chose "Incendies" raconte l'histoire d'un deuil et ce qu'il va déclencher chez ceux qui restent. Jeanne et Simon sont jumeaux et lorsque leur mère meurt, le notaire (ami de la famille, impressionnant Remy Girard) leur transmet ses dernières volontés lors de la lecture du testament : l'un doit remettre une lettre à leur père qu'ils n'ont jamais connu, l'autre doit aussi remettre une lettre mais à leur frère dont ils ne connaissaient pas l'existence. Alors que Simon rejette cette mission plus que paradoxale par rapport au comportement de leur mère, Jeanne (magnifique Vanessa Désormeaux-Poulin ; la découverte du film) décide d'aller seule chercher leurs racines au Moyen Orient. Ce qu'elle va découvrir va bouleverser sa vie.
Avec aisance Denis Villeneuve échafaude une structure en deux temporalités qui vont s'entrechoquer par la vérité. La première est celle du présent et de la quête des jumeaux, l'autre suit la jeunesse de Nawal, leur mère, dans les années 70. Denis Villeneuve a choisit de ne pas identifier le pays du Moyen Orient où catholiques et musulmans s'affrontent et où 80% du film se déroule, selon certains indices, dont le pays d'origine de l'auteur (Wajdi Mouawad) de la pièce source du film, le Liban serait l’option la plus probable : "Beyrouth ou Daresh ? Cette question m’a hanté durant toute l’écriture du scénario. J’ai finalement décidé de faire comme la pièce et d’inscrire le film dans un espace imaginaire comme Z de Costa Gravas afin de dégager le film d’un parti pris politique. Le film traite de politique mais demeure aussi apolitique." (source Allo Ciné). L’autre parti pris fort de "Incendies" c’est la mise en scène silencieuse de Denis Villeneuve, juste, implacable mais toujours subtile, elle se permet deux trois éclats sonores (la séquence de la piscine) en adéquation parfaite avec la rage des jumeaux. Il y a presque un savoir faire nordique dans cette façon de manier montage précis, cadrage frontaux et mouvements d’appareils lents, sans jamais tomber dans la condescendance du film que se regarde filmer et fait durer les plans outre mesure pour tomber dans le voyeurisme auteuriste. Belle découverte que ce film poignant et grande découverte que ce cinéaste canadien dont la filmo (4 longs métrages et quelques courts) est plus qu’incomplète par chez nous. Allez voir "Incendies" pendant qu’il est encore temps.

Note : 5.5/6

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